Jean-Luc Plagnol a fondé et dirigé pendant près de 30 ans Corefor, entreprise spécialisée dans la formation et le conseil RH, et a présidé la CGPME de 2009 à 2011. Aujourd’hui indépendant, il témoigne de son expérience de Manager de Transition sur une mission de remplacement du dirigeant d’une entreprise de 30 salariés.
Pourquoi le management de transition ?
Après un long parcours de dirigeant d’entreprise et la fin de Corefor, mon repositionnement a été de recréer une activité. Un poste de salarié n’était plus d’actualité ! Je me suis lancé dans le domaine du conseil dans les ressources humaines avec un objectif au départ : proposer des services de responsable RH dans une entreprise qui n’a pas les moyens d’avoir un DRH. Soit la PME de 50 salariés qui commence à avoir d’importantes obligations et qui a besoin de structurer sa fonction RH. C’est ce que je ciblais.
Je suis venu au management de transition par opportunité. J’ai rencontré Stéphane Valet, responsable du cabinet de management de transition Cairn Experts, par le réseau. Il m’a proposé une mission qui calquait avec mon profil, et c’était parti !
Quelle a été votre mission ?
« Cette PME de 30 salariés est menacée par l’indisponibilité soudaine de son dirigeant à être à la tête de l’entreprise »
J’avais pour objectif de tenir les rênes de l’entreprise pendant la période d’absence de son dirigeant, et de la rendre dans le même état que lorsqu’elle m’avait été confiée à son retour. C’était une entreprise en difficulté, qui s’est retrouvée du jour au lendemain sans son dirigeant. Il devait revenir au bout de six semaines, mais son état de santé s’est aggravé et j’ai compris qu’il ne reviendrait jamais. La meilleure solution était de trouver un repreneur. J’ai tout mis en œuvre pour maintenir l’activité et aujourd’hui, un repreneur qui se manifesterait trouverait une entreprise en bonne santé.
La mission du manager de transition telle que je la conçois dans ce contexte particulier ou il faut remplacer le chef d’entreprise, quelle que soit sa problématique (santé, accident, indisposition…), est de se mettre dans les pas du dirigeant. Il n’est pas là pour faire du conseil ou mettre en place de nouveaux projets. Il peut suggérer, proposer des axes d’améliorations, mais n’agira pas, du moins sans l’accord du dirigeant.
Comment avez-vous abordé cette situation complexe ?
J’ai commencé par analyser la situation, comprendre le fonctionnement de l’entreprise, son organisation, son état actuel, son management. Quand on prend au pied levé les rênes d’une entreprise, il faut se transposer au dirigeant, prendre une certaine posture. C’est pour cela qu’il est très important de comprendre le fonctionnement de l’entreprise très rapidement. Les principaux point et leviers sont : rassurer le personnel et entrer très vite en relation avec eux, écouter, comprendre ce qu’ils font, leurs points de vue ; et rassurer les clients, leur dire que je suis là pour prendre le relais et que l’entreprise continue.
Quel contact avez-vous eu avec le dirigeant ?
Je l’ai rencontré malade, il n’était plus présent dans son entreprise depuis 15 jours. Moins d’une semaine après j’étais dans l’entreprise, et je ne l’ai revu qu’un mois après. Je n’ai en fait eu que très peu d’informations de sa part. J’ai pu échanger avec lui par email voir par téléphone sur des points clé où j’avais besoin de son éclairage, mais à chaque fois c’était compliqué. Il avait du mal à « entrer dans le bain », on a plus souvent parlé de sa maladie que de son entreprise. Il a fallu se consacrer à l’essentiel, préparer une liste de questions et récolter les éléments les plus importants possibles. Pour le reste, je voyais avec les personnes qui connaissaient l’entreprise, les employés.
Quelles aptitudes vous ont été nécessaires ?
Pour ce genre de mission, au pied levé, il faut avoir la conscience d’aller à l’essentiel. Se concentrer, repérer les informations primordiales de façon à pouvoir faire avancer l’entreprise. Avoir une très grande capacité d’adaptation, et s’investir énormément ! Ce n’est pas le genre de mission que l’on prend à la légère « Il faut y aller à fond, ne pas se poser de question, et ne pas compter son temps ». Avoir des qualités humaines également. Il faut savoir rassurer car tout le monde est dans l’inquiétude, donner confiance. La confiance, ça se mérite. Pour la gagner, j’ai fait comme tout le monde dans le secteur : j’étais à 6h du matin dans l’entreprise pour accueillir les ouvriers jusqu’au soir, pour montrer qu’il y avait une présence, répondre à leur demande et résoudre les problèmes.
Quel bilan faites-vous de cette première mission ?
Ce fut une expérience très riche et intéressante. Je me suis retrouvé dans un contexte de gestion d’une entreprise avec un aspect très fort de curiosité, de découverte d’un nouveau secteur qui a été très stimulant. Et tout cela sans le stress du dirigeant de l’entreprise. C’est-à-dire sans se demander tous les mois comment on va manger, passer telle échéance, rembourser tel emprunt…j’ai retrouvé la même activité, la même stimulation de diriger une entreprise, sans les enjeux, sans l’affectivité que l’on a dans l’entreprise que l’on a créée. Ce n’est pas du tout la même tension. Cela permet de garder ce recul et cette sérénité qui permettent de mieux gérer les situations, de voir rapidement des solutions et de prendre des décisions plus sereinement.
Êtes-vous prêt à reprendre un mission de manager de transition?
Oui, c’est un métier qui me convient bien aujourd’hui. J’ai un défaut : je n’ai pas la fibre commerciale. Quand je suis en relation avec la personne, que le contact est pris, je n’ai aucun problème, mais je ne suis pas à l’aise dans les démarches commerciales. Travailler avec le cabinet Cairn Experts me permet de me consacrer pleinement à ce que j’aime faire, m’ouvre des portes, et me permet d’avoir beaucoup plus d’opportunités !